Jusqu’où le suivrons-nous?
Nous atteignons déjà la mi-carême et la question du Christ à chacun de nous brûle encore :
Jusqu’où me suivras-tu?
Le chemin de Jérusalem est long et il commande beaucoup d’endurance et de persévérance. Les alpinistes qui gravitent l’Everest savent qu’ils ne peuvent y parvenir d’un seul trait.
Certains abandonnent dès le début du chemin; d’autres font un bout un peu plus long, mais succombent à la fatigue et à l’épuisement. Seule une infime minorité arrive à tenir le coup et à atteindre le sommet. Ainsi en est-il du chemin de Pâques. Nous avons tous et toutes nos limites. Dieu seul a la mesure de nos capacités et de notre cœur.
Ces derniers temps, dans toutes les sphères de la vie, on ne parle que de sondages :
- Des chefs d’État veulent tester leur niveau de popularité;
- Des statisticiens désirent mesurer le degré de satisfaction et d’insatisfaction d’une population;
- Des gouvernements souhaitent agir en fonction de la volonté de leurs mandants;
- Des institutions, associations et communautés engagent un processus en vue de se donner de nouveaux dirigeants…
Partout et en tout, presque tout le monde mise sur les sondages pour avancer.
- La Grande-Bretagne se trouve coincée avec l’imbroglio du Brexit né pourtant d’un référendum sur sa sortie de l’Union européenne.
- Le Pape François a convoqué une rencontre au Vatican afin de prendre la mesure des problèmes de pédophilie qui ravagent l’Église.
- Au Canada, des sondages sont réalisés qui visent à dégager l’impact de l’affaire SNC-Lavallin sur la gouvernance du parti libéral du Canada à quelques mois de l’élection fédérale du 21 octobre prochain…
Des firmes se sont spécialisées à saisir la pensée et l’opinion des gens en utilisant des techniques sophistiquées de statistiques et de probabilités.
On découvre qu’il y a toujours des marges d’erreur qui fragilisent ces consultations les rendant approximatives et incertaines. Les résultats de certaines élections ont parfois défié les sondages pour prendre une orientation tout à fait contraire aux estimations.
C’est que nos jugements sont souvent biaisés et teintés de positionnement partisan et subjectif. Nous analysons à partir de l’extérieur et des apparences au détriment du cœur et de l’objectivité. La mesure humaine subit parfois la contamination des passions, des sentiments d’amitié ou d’inimitié, d’amour et même de haine.
Reprenant un symbolisme très fort, le prophète Jérémie (Jr 11, 20) dit que le Seigneur « scrute (sonde) les reins et les cœurs. » Rien de l’être humain n’échappe à son regard. Plus loin, le psalmiste criera : « Tu me scrutes, Seigneur, et tu sais! Tu sais quand je m’assois, quand je me lève; de très loin, tu pénètres mes pensées! » Ps 138
Dieu est le vrai sondeur qui ne se trompe pas parce qu’il voit le cœur. Nul ne peut lui mentir ou l’induire en erreur. Il sonde les reins et les cœurs.
Contrairement au visage et à la bouche, les reins et les cœurs sont invisibles. Dans la Bible, les reins catalysent la force de procréation et de combat, le siège des passions et des désirs secrets. Le cœur est le centre de l’amour et de l’affectivité, le lieu de la conscience impénétrable à l’œil nu.
Pour nous, Viateurs, qui nous engageons avec Jésus, jusqu’où le suivrons-nous sur ce chemin de vérité, d’amour et de liberté?
Jusqu’où sommes-nous prêts à dépasser nos catégories humaines pour adopter celles de Dieu « qui voit dans le secret de notre cœur »? Mt 6.
Jusqu’où sommes-nous disposés à nous rendre sur ce long chemin de Jérusalem?
Le temps est venu de déposer nos lourds manteaux d’hiver pour avancer plus facilement sur la route conduisant au ressuscité de Pâques.
Bonne poursuite en direction de Pâques !
Nestor Fils-Aimé, c.s.v.
Supérieur provincial
Ouagadougou
Source :
Bulletin d’information – Mars 2019 – No 219 (PDF).