Année de la vie consacrée : vœu d’obéissance
Introduction
Pendant près de 20 ans, j’ai eu la mission d’animer les sessions sur la trilogie des vœux à l’Internoviciat de Montréal. À l’occasion de l’année de la vie consacrée, j’aimerais partager le fruit de ma réflexion et de mes échanges avec les novices sur chacun des vœux.
Vous pourrez donc lire un texte qui s’efforce de présenter, de manière concise, les éléments que je crois majeurs pour la compréhension de chaque vœu en ce 21e siècle.
Et si le vœu d’obéissance avait quelque chose à dire à tous les baptisés ?
Ils n’ont pas tort ceux qui affirment que le vœu d’obéissance est en contradiction avec certains courants de la culture actuelle qui insistent sur la capacité de l’individu de tout décider par lui-même sans référence aucune à une institution (comme l’Église) ou à une norme extérieure à la personne.
Jésus a été obéissant
Le vœu d’obéissance devient compréhensible par un regard de foi sur Jésus, lui qu’on peut définir comme le « grand obéissant ». Pour quiconque pose un regard objectif sur le Christ comme l’Évangile nous le montre, l’évidence s’impose : Jésus, homme adulte et libre, a été obéissant.
Ancré dans sa communion filiale avec le Père, le Christ a fait de la recherche de la volonté de Dieu la priorité de sa vie. À tout point de vue, Jésus parle, agit et vit en Fils, et il se réfère constamment pour toute décision à la mission que le Père lui confie.
À la suite de Jésus
À la suite de Jésus, l’obéissance à Dieu fait partie de la condition commune à tous les baptisés. En effet, l’expérience chrétienne amène le disciple à entrer dans l’obéissance du Christ.
En accueillant l’amour personnel et intense que Dieu lui porte en Jésus Christ, le chrétien expérimente la communion avec le Père. Il découvre qu’il doit toute son existence à l’amour du Père.
Le chrétien mature reconnaît que son « indépendance – et son épanouissement comme personne – se construit dans la dépendance de l’acte créateur et vivificateur de Dieu » (Y. Raguin, Chemins de la contemplation, DDB, p. 129). Cette dépendance n’est pas de la servilité puisque le Père respecte la liberté humaine et propose une relation d’amour avec chacun de ses enfants.
La vie de foi
La vie de foi entraîne, comme par une loi interne, l’obéissance chrétienne qui n’a qu’un seul objet, la Parole de Dieu à écouter et à accomplir, et une règle de vie, l’Évangile. Le chrétien est conscient que sa volonté personnelle doit passer au crible de l’Évangile pour devenir conforme au projet de Dieu qui représente le meilleur pour lui.
Cette obéissance doit être libre et vécue dans le cadre d’une relation avec Dieu. Car « seule est humaine une obéissance libre et chrétienne, une obéissance d’amour » (D. Nothomb, « Seul l’homme libre peut être obéissant » dans Vie consacrée, 1992, no 5, pp. 301-317). Le chrétien a toute sa vie pour devenir obéissant, discerner les vues de Dieu, y adhérer et Le servir.
Le voeu d’obéissance
Or, voici que des hommes et des femmes font profession du vœu d’obéissance. Pour quelle raison? Ils ont comme mission de manifester visiblement, par leur mode de vie, par leur règle communautaire et personnelle, jusque dans la structure de la communauté, le cœur du comportement chrétien, l’obéissance de la foi.
Pour cette raison, la pratique des vœux touche tout ensemble le cœur, les gestes, l’esprit et le corps des religieux, comme leur relation au monde et à autrui. Ainsi, « la personne religieuse et la communauté deviennent des signes vivants de l’obéissance à laquelle tout baptisé est appelé. » (N. Hausman, Où va la vie consacrée, p. 91-92).
L’obéissance dans la vie religieuse
Sur quoi au juste portera l’obéissance des religieux? Qu’ils se rassurent : l’obéissance n’est pas comme la soumission d’un enfant à ses parents, ou un instrument ascétique de renoncement à la volonté propre pour grandir dans la sainteté ou encore un moyen de domination de certaines personnes sur un groupe.
L’obéissance sera possible par une médiation, la communauté dans laquelle le Seigneur appelle les religieux. Ceux-ci mettront les intérêts de leurs communautés – le bien commun – au-dessus de leurs intérêts personnels.
Ils feront tout pour réaliser, avec leurs frères et sœurs, la mission que Dieu confie à leurs communautés, et pour incarner le charisme (i.e. la facette de l’Évangile ou l’aspect du mystère du Christ) que le Seigneur leur demande de manifester au monde.
L’obéissance des religieux se réalise donc par l’adhésion à un projet commun, aux caractéristiques bien spécifiques, défini par un document fondateur (Constitution, Règle), et dont un élément subordonné est l’obéissance aux supérieurs.
Le témoignage de la vie religieuse
Tout peuple, toute société, a besoin d’un petit groupe qui va lui rappeler ses valeurs et ses traditions les plus importantes, sans lesquelles il ne saurait vivre. On peut raisonnablement dire des personnes consacrées qu’elles incarnent des valeurs absolument fondamentales de l’Évangile, comme la recherche d’un amour accueillant et respectueux de l’intégrité du prochain (chasteté), le partage équitable des biens (pauvreté) et la recherche de la volonté de Dieu (obéissance).
L’obéissance des religieux a quelque chose à dire à tous les baptisés : il est meilleur de choisir Jésus et son Évangile comme critère premier pour développer son être et mener sa vie. En devenant progressivement et quelquefois non sans mal une « mémoire vivante de l’Évangile », les religieux rendent un précieux service au Peuple de Dieu.
Source :
Bulletin d’information no 180 (PDF).