L’homme parfait
Les livres d’histoire nous enseignement, que dans les sociétés anciennes, ou modernes, des personnes, la minorité, prennent les postes de commande, tandis que les autres, la grande majorité, se montrent plus dociles pour suivre les recommandations des premiers.
Parmi les grands noms, qui gouvernèrent les peuples, en bien ou en mal, dans le cours de l’histoire, nous connaissons : Jules César, Napoléon Bonaparte, Gengis Khan, Périclès, Staline, Cléopâtre, Alexandre le Grand, etc.
Nous retrouvons un cheminement semblable dans les communautés religieuses. Des religieux deviennent supérieurs (dans la fonction seulement) pour un moment dans la vie afin de remplir un mandat de pouvoir (le service d’autorité). Les autres, par principe, se soumettent, bon gré mal gré, aux directives des supérieurs.
Dans notre formation au Noviciat, on nous annonçait avec candeur que les supérieurs étaient les représentants de Dieu sur terre.
On nous annonçait aussi qu’en obéissant à nos supérieurs nous étions de fidèles sujets, même si les supérieurs se trompaient dans leurs décisions. Alors, il fallait bien obéir à nos dirigeants. Mais depuis le Concile, et même avant, les mentalités se montrent beaucoup plus réfractaires aux dires d’hier.
Si nous reculons dans l’histoire des Clercs de Saint-Viateur canadiens, nous rencontrerons un confrère qui laissa sa marque par son comportement bien spécial. Il donnait l’impression qu’il se croyait parmi les grands de ce monde qui laissèrent leur marque dans l’histoire. Il voulait laisser la sienne aussi.
Il donnait son appréciation ou son commentaire sur tout ce qui bougeait autour de lui. Il proclamait son impression, car il se voyait avec un grand talent, pour favoriser le bien-être de ses confrères. Mais il y avait un petit problème. Les confrères, qui vivaient près de lui, pensaient différemment de ses dires.
Lorsqu’il œuvrait sur le plancher des vaches, il donnait des conseils aux sans-dessein d’en haut. Quand il fut en haut, il donnait des conseils aux insignifiants qui marchaient sur le plancher des vaches. Quand il se retrouva les deux pieds sur terre, il maugréa contre ceux d’en haut sans épargner ceux d’en bas.
Selon lui, tous les faits et gestes qui le concernaient étaient faits pour la plus grande gloire de Dieu. Malgré sa bonne foi, il rencontrait des confrères qui se montraient incrédules devant son comportement. Mais il faut surtout retenir que la Providence, malgré une certaine lenteur, dans certains cas, arrange bien les choses en ce monde.
Comme tout homme est mortel, il faut bien le reconnaître, notre homme subit ce sort : triste selon lui, mais heureux pour les autres.
Ses pairs, qui l’avaient bien connu et surtout bien enduré, se réunirent pour lui rendre un dernier hommage (en fait le seul) par la plume de l’un d’entre eux. Ce dernier écrivit dans un message laconique et en style direct : « Lorsque son âme se présenta au purgatoire, la terre était enfin délivrée de grands maux. »
Wilfrid Bernier, CSV
Source :
Bulletin d’information – Juin 2018 – No 212 (PDF).