L’importance de la médaille
L’arrivée du Concile Vatican II apporte bien des changements dans les communautés religieuses. Pensons aux costumes des communautés féminines qui subissent bien des changements et, pour les hommes, la fin du port de la soutane.
Les Clercs de Saint-Viateur n’échappent pas au vent de changement engendré par les Pères de l’Église. L’anecdote suivant se déroule avant le concile. Pour bien comprendre le tout, il faut revoir nos constitutions et replacer l’événement dans la mentalité de l’époque.
Avant le passage de Vatican II, les constitutions des Clercs de Saint-Viateur mentionnent deux classes dans la congrégation : celle des catéchistes, revêtus ou non du sacerdoce et celle des aides-temporels.1
Les constitutions mentionnent également qu’il y a trois rangs dans la congrégation : celui des catéchistes et des aides-temporels mineurs, profès de vœux temporaires; celui des catéchistes et des aides-temporels formés, profès de vœux perpétuels; celui des catéchistes majeurs…
L’article 17 mentionne « Les catéchistes majeurs forment le corps dirigeant de la congrégation, en ce sens qu’ils ont seuls voix active et passive dans les chapitres, et que certaines charges leur sont réservées par les constitutions ». C’est là que le bât blesse.
La tradition orale rapporte, à travers les branches, que certains religieux croyaient avoir les dispositions nécessaires pour donner de sages conseils dans les réunions. Mais les supérieurs, de l’époque, avaient une opinion différente des aspirants ou des soupirants sur ce sujet délicat. On refusait de croire en leurs talents les empêchant ainsi de monter d’une marche dans la hiérarchie.
Le malaise devenait plus pénible quand les personnes concernées voyaient leurs confrères de noviciat ou des plus jeunes accéder aux grands honneurs : c’est-à-dire le majorat. Mais de plus un signe bien sensible rappelait à tous qui était majeur : la médaille en forme de croix.
Si l’anneau indique que le confrère a prononcé ses vœux perpétuels, la fameuse médaille que les majeurs portaient visiblement et avec grand respect, leur rappelait, sans doute, l’importance qu’on attachait à leurs sages décisions dans les chapitres, mais indiquait à tous leur rang privilégié. Il ne faut pas oublier que les officiers militaires portent agréablement leurs insignes au grand jour.
Mais des malins osaient prétendre que certains majeurs aimaient porter leur médaille de majeur pour indiquer l’importance qu’ils avaient dans les rangs de la congrégation. On rappelle que certains postes de direction étaient réservés uniquement aux majeurs.
Un confrère, dont nous taisons le nom, écrivait, un jour, à son provincial pour expliquer la situation humiliante qui l’empêchait de discuter, d’expliquer ou de suggérer aux supérieurs les meilleures façons pour bien diriger les affaires de la communauté lors des réunions du chapitre provincial.
À bout d’arguments pour se faire entendre, le bon confrère de terminer sa lettre en écrivant : « Et comme je n’ai pas voix au chapitre faute d’échancrure à ma médaille », je ne puis apporter à mes confrères les bienfaits des talents que le Seigneur m’a donnés.
Source :
Bulletin d’information – Juin 2017 – No 204 (PDF).