Et nous irons …

Fête de la Saint-Viateur
Outremont, 21 octobre 2017

Homélie

Rm 4:18-32 / Lc 9:61-56

Les hasards de la liturgie ou plutôt sa richesse, proposait comme première lecture pour aujourd’hui un extrait de la lettre aux Romains qui vous a été proclamé.

Nous l’avons bien volontiers retenu pour notre célébration. Elle nous donne de réentendre la méditation de Paul sur la grande figure d’Abraham, notre père a tous dans la foi.

Il nous dit de lui :

Espérant contre toute espérance, il a cru. Et nous savons la suite : Abraham se leva et partit …

On croit entendre de la part de Yahweh comme une parole prophétique, une sorte de : Lève-toi et marche …

C’est ainsi qu’Abraham se fit nomade avec son épouse la vieille Sara. Contre toute espérance ils furent féconds.

À son tour c’est bien ce que Jésus devint, un nomade, lui le marcheur en constant déplacement.

MarcherIl n’avait, nous dit l’Écriture, pas d’endroit pour reposer sa tête. Avec ses compagnons, on le retrouve debout et en marche.

Être debout, être en marche, comme si c’était par excellence la stature du maître et du coup celle du disciple, la stature du croyant, la stature du chrétien.

Il ne faut pas s’étonner alors de retrouver Jésus en train de redresser la femme courbée, en train de remettre debout la femme adultère, de dire au paralytique : Lève-toi et marche … Et quand l’horizon se bouche, il prend une autre route.  La marche continue.

C’est bien ce qui s’est passé ce jour-là, quand arrivant dans un village de Samaritains, Jésus et ses compagnons essuient un refus. Qu’à cela ne tienne, Luc précise de façon presque laconique: Ils partirent pour un autre village.

Tout cet épisode marque cependant un tournant décisif dans la vie de Jésus. Le même Luc écrit, nous l’entendions :

Comme s’accomplissait le temps où il allait être enlevé au ciel, Jésus le visage déterminé, prit la route de Jérusalem.

J’aime bien ici la nouvelle traduction liturgique : Jésus le visage déterminé, prit la route de Jérusalem, la route de son destin.

Jésus ne se sera pas contenté de dire à l’un et à l’autre :  Lève-toi et marche … Il se sera tenu debout et le visage déterminé il aura marché. Lui aussi aura marché.

Abraham, Jésus, une même dynamique et c’est bien celle que l’on retrouve chez Viateur accompagnant Just, son saint évêque jusqu’au désert de Sété.

Histoire ou légende, peu importe, elle est associée à Viateur le saint lecteur de Lyon, Viateur le routier, Viateur le serviteur loyal, celui qui se met en marche vers l’inconnu, vers un avenir incertain.

Histoire ou légende, peu importe, sa figure est le choix de Querbes, ce Querbes qu’on appelle le fondateur contrarié…  un qualificatif qui en dit long sur ce qu’a été sa route.

On sait les difficultés qui furent les siennes ne serait-ce qu’aux premières heures de sa fondation. Il demande une autorisation royale qu’il obtient sans difficulté. L’approbation diocésaine lui cause plus de souci. Monseigneur l’administrateur apostolique regarde de haut son projet et supporte mal sa nouveauté. Mais comme il en a besoin, il consent à l’autoriser.

À l’automne de 1831, plus précisément un 5 novembre, avec ses deux premiers compagnons, Pierre Magaud et Pierre Liauthaud, Querbes signe ses promesses de prêtre-catéchiste.

Debout, ils se mettent en marche. L’aventure viatorienne vient de commencer. Mais souvent le temps est à l’orage comme celui qu’a connu le petit Querbes le jour de sa naissance, rue Lanterne à Lyon. Et il lui en faudra du courage pour continuer. Heureusement il n’en est pas dépourvu.

Les peines, les soucis et les chagrins surabondent, note-t-il dans une de ses lettres, mais il n’hésite pas à poursuivre : Monseigneur peut nous jeter par terre d’un trait de plume. Nous nous relèverons un havresac sur le dos et nous irons guidés par la Providence, chercher de nouvelles épreuves.

Nous nous relèverons et nous irons …

Abraham, Jésus, Viateur, Querbes, Liauthaud, Champagneur, tous des marcheurs, des passionnés pour la Parole, pour le service de la Parole. Des passionnés debout et en marche le visage déterminé.

Et voilà qu’invités en cela par notre supérieur provincial et ses conseillers, nous sommes à dire : Levons-nous et marchons.

Voilà qu’aujourd’hui en ce 21 octobre, nous nous retrouvons en famille autour du souvenir de Viateur et de Querbes. Puissent-ils encore tous deux donner sens à notre mission. Puissent-ils nous garder debout et en marche le visage déterminé.

Querbes écrivait : Nous nous relèverons et nous irons !

Amen

Père Jacques Houle, c.s.v.

Source :
Bulletin d’information – Octobre 2017 – No 206 (PDF).

A lire également