Hommage – Funérailles du P. Louis Genest, c.s.v.
LOUIS GENEST (1923-2023)
Homélie
Les extraits de la Parole de Dieu proposés aujourd’hui nous font entrer au cœur de l’homme et du confrère qu’a été le P. Louis Genest.
J’ai eu le bonheur de partager avec lui des activités, des temps de réflexion, des repas pendant plus de trente ans. Toujours fidèle au poste, jusqu’à plus de 90 ans, le P. Genest se présentait chez son directeur, son crayon à la main et son bout de papier pour demander une certaine autorisation sur ce qu’il prévoyait dire aux jeunes lors du lancement des activités parascolaires. Nous reconnaissons là un trait fondamental de ce serviteur de la Parole, de cet éducateur au beau de la vie, de ce confrère aimant de la nature et des humains que nous sommes.
« Chacun doit être prompt à écouter, lent à parler, lent à la colère… », nous dit saint Jacques dans sa lettre. Oui, le P. Genest était de cette nature. Il avait compris, très tôt même, que l’annonce de l’Évangile ne se fait pas la croix dans une main et la Bible dans l’autre. Il a su « accueillir dans la douceur la Parole semée » en lui. Il l’a vécue au quotidien avec une grande liberté. On aurait pu dire aussi que le P. Genest n’avait pas toujours une montre au poignet. Quand il était avec des jeunes dans la montagne ou sur le bord de la rivière dans une de ses expériences scientifiques, le temps ne comptait plus. Il fallait choisir cet instant présent pour laisser les jeunes s’imprégner de la beauté de la vie. J’ai été témoin, je ne sais trop combien de fois, du commentaire suivant. Au secrétariat, constatant l’absence d’élèves en classe, on demandait : Étaient-ils avec le P. Genest ? Si la réponse était oui, on ne cherchait plus les jeunes.
La foi au Christ se vit dans l’ordinaire de la vie de tous les jours. L’éducateur de la foi qu’était le P. Genest le savait très bien. Il savait pointer du doigt vers l’action de Dieu pour que les jeunes s’y attardent. Avec eux, il aurait pu réécrire le Psaume 148 que nous avons entendu. Alléluia, loué soit Dieu pour toute cette nature qui nous entoure ! Alléluia, loué soit Dieu pour ces jeunes qui grandissent en développant le meilleur d’eux-mêmes.
Mais, le P. Genest ne faisait pas que louer la beauté du monde. Avec son sourire désarmant, il s’engageait dans la défense de celle-ci. Son engagement pour la protection de la colline de Rigaud est connu comme celui de la mise en place des Clubs des Jeunes Naturalistes et du Centre écologique de Port-au-Saumon. Le P. Genest croyait profondément que la meilleure louange à Dieu pour la beauté de sa création était d’y entraîner jeunes et adultes pour la sentir, la toucher, l’entendre, la goûter et la contempler.
Sa vie était un témoignage d’une Parole de Dieu pleine de tendresse. Il écrivait dans une réflexion sur sa vie en 1997. « Les jeunes de Bourget remarquent la joie dans nos yeux ou sur nos figures et ils en cherchent la cause. Toutes les occasions sont bonnes pour témoigner du Christ. » Constatant les changements chez les jeunes au niveau de la recherche spirituelle, il ne baissait pas les bras croyant en son Dieu, celui de l’impossible, celui de l’action de l’Esprit là où on ne s’y attend pas.
Comme le dit saint Luc, « un bon arbre ne donne pas de fruit pourri ». « L’homme bon tire le bien du trésor de son cœur qui est bon ». Voilà le puissant message d’amour que nous laisse le P. Genest. La Parole de Dieu, encore plus en ces temps difficiles, nous appelle à manifester une grande bonté, pas une bonté mièvre et naïve. Une bonté qui croit en chaque humain, une bonté qui ouvre des voies d’avenir, une bonté qui appelle à accompagner nos sœurs et frères sur les routes de la vie. Une vie parsemée d’embûches, soit, mais une vie pleine d’espérance si nous savons y percevoir, jour après jour, les clins d’œil que Dieu nous fait.
Pour le P. Genest, Dieu a mis autour de nous tout ce dont nous avons besoin pour être heureux. Permettez-moi de citer un autre extrait de son texte de 1997. Il parle ici du choix du site de Port-au-Saumon. « Je dois vous confier qu’à mes yeux le choix du site est très important. Un environnement d’une beauté exceptionnelle est de nature à imprégner l’âme des jeunes.
Un jour, un jeune homme d’une vingtaine d’années arrive en canot : « durant le parcours, dit-il, en avironnant, je sentais comme une grande tendresse de la nature qui s’écoulait jusqu’à moi : les arbres, les fleurs, les oiseaux, l’eau, le fleuve, l’air… » Dommage qu’il ne poussa pas plus loin : d’où venait cette tendresse ? J’ai observé que la communion assidue avec la nature rend les êtres humains plus vrais : rien d’artificiel ni de tricherie dans les éléments simples de la nature : le soleil, l’eau, la pluie, le roc, le feu, la forêt et ses merveilles de vie. »
Ainsi, avec saint Luc, le P. Genest pouvait dire : « L’homme qui met en pratique la parole ressemble à celui qui a construit sa maison sur le roc. » L’évangéliste nous interpelle encore ce matin. Sur quoi, sur qui basons-nous notre vie ? Quelle est cette Parole que nous sommes appelés à suivre ? Comment allons-nous laisser transparaître dans nos vies la bonté de Dieu, la tendresse de son Fils et la communion de l’Esprit ?
La réponse est en nous. Pour terminer, écoutons la vision éducatrice du bon P. Louis. « Je pense que si on peut permettre aux jeunes que leur capacité d’émerveillement puisse traverser la période difficile de l’adolescence jusqu’à l’âge adulte, c’est le plus beau et le plus grand service qu’on peut leur rendre. Car alors, tout peut arriver puisqu’ils seront capables de vibrer et de s’émerveiller devant tout ce qui est grand, noble et beau. Alors on pourra voir s’épanouir un Mozart, un peintre, un poète, un Einstein, un Pierre Dansereau, un François d’Assise, une mère Teresa… »
Voilà ce que nous lègue le P. Genest! Voilà ce à quoi nous appelle notre foi en ce Dieu de la Vie! Prions pour que nous sachions toujours marcher, malgré nos limites, sur cette route de la vie heureuse en serviteur de la Parole.
Jean-Marc St-Jacques, csv
3 novembre 2023