Les vertus théologales du père Querbes
Homélie prononcée lors du rassemblement à la mémoire du P. Querbes le 1er septembre 2019 à Rigaud.
C’était le lundi 29 août 1859. Le père Hugues Favre donna les derniers sacrements au père Querbes qui, avec peine, dit quelques mots que le frère François Favre consigna dans un registre :
Allons mes enfants. Ce serait à moi maintenant à vous parler. Mais je n’en ai pas la force. Vous avez vu l’union qui a toujours existé entre M. Favre et moi. Reportez sur lui la même obéissance que vous aviez pour moi. Bannissez loin de vous l’esprit de parti ou de système. Soyez obéissants. Faites part de mes recommandations à ceux qui sont absents. Je vous donne ma bénédiction comme je la donne à tous.
Cent soixante années nous séparent des dernières recommandations et de la bénédiction du père Querbes; toutefois près de deux siècles nous unissent toujours à son inspiration, son dévouement incessant, sa foi inébranlable en la Providence. Une fidélité qui, comme il nous le demande, est un appel à l’unité.
La Positio présentée à la Sacrée Congrégation pour les causes des saints soutenant la demande que le Serviteur de Dieu Louis Querbes soit béatifié et éventuellement, espérons-le, inscrit sur la liste des témoins particuliers de Dieu – cette positio donc – en plus d’offrir un résumé des principales étapes de sa vie, elle présente les vertus de notre fondateur.
J’aimerais ce matin, profiter de ce rassemblement communautaire pour attirer notre attention sur quelques traits évocateurs de ce que nous appelons les vertus théologales du père Querbes : la foi, l’espérance et la charité.
Mais avant, souvenons-nous de cette dimension spirituelle fondamentale que le père Querbes confie à ses enfants : basez notre vie sur les « vertus ordinaires ». Répondant aux préoccupations oiseuses du père Faure, le père Querbes le dit sans ambages :
Hélas, mon cher père, pendant que nous disons beaucoup, le temps passe et nous n’agissons pas. Promettons beaucoup moins et faisons davantage… Commençons par fonder sur ces vertus que je regarde comme ordinaires l’édifice de notre salut et de notre perfection et le reste nous sera donné.
Il les nomme alors : la foi, le zèle, l’humilité, la pureté, l’amour du travail, de la retraite et du silence. Ces vertus sont comme le déploiement dans le concret de la vie des trois grandes vertus que sont la foi, l’espérance et la charité.
J’ose espérer une poursuite du travail jadis amorcé de présentation de ces vertus, car elles nous permettent de connaître notre fondateur de l’intérieur, ses motivations profondes qui en ont fait un homme inébranlable dans sa foi et toujours certain que la Providence de Dieu le devançait, l’inspirant et le motivant.
Parler de la foi du père Querbes c’est souligner son sentiment profond de la présence de Dieu, une présence aimante. C’est dans les événements qu’il écoute ce que Dieu lui dit. C’est à travers les événements et ses préoccupations qu’il lui parle. Ainsi a-t-il perçu l’appel de Dieu à faire naître son association.
Il recherche la volonté de Dieu et pour le Serviteur de Dieu, c’est plus qu’une formule! Il affirme avec foi que Dieu est là, dans l’événement. Parler de la foi du père Querbes c’est donc entrer dans sa recherche attentive parce qu’aimante de Dieu, une adhésion à sa volonté. L’idéal du sage, dit Ben Sirac de Sage, c’est une oreille qui écoute.
Au père Champagneur qui s’inquiétait de sa charge et des tracas de toutes sortes, le père Querbes adresse ces paroles :
Soyez toujours indulgent et patient, attendez les moments marqués par la divine Providence.
Voilà la conviction profonde du père Querbes, celle sur laquelle il fonde son espérance : Dieu y pourvoira. C’est le sentiment de la présence agissante et bienveillante de Dieu pour ses enfants. L’audace du père Querbes pour sa fondation naissante lui vient de cette confiance qui, en définitive, est une foi avec… une foi partagée.
Le père Querbes continue de nous interpeller :
Comment peut-on attendre beaucoup de la Providence de Dieu qu’on ne voit pas si on n’espère rien dans son frère qu’on voit?
Finalement, quelques mots sur le sens de la charité chez Louis Querbes. Le sentiment de la présence de Dieu l’a amené à interpréter les événements comme autant de signes, d’appels ou de grâces qu’il reçoit de la part de Dieu et auxquels il doit répondre. La charité chez lui implique une lecture des signes des temps qui se traduit par deux éléments fondamentaux : l’urgence d’agir et un zèle remarquable.
Dieu parle par les événements du moment et appelle une réponse zélée, c’est-à-dire qui se fixe moins sur les efforts personnels que sur le miracle qui se produit lorsque nous nous rendons disponibles à ce que l’inattendu de Dieu se produise. Dans la bouche de Querbes zèle est synonyme de charité. L’humilité profonde, c’est celle qui tourne notre regard vers la terre, ce qui a été créé et voir déjà en Dieu le devenir promis.
Je termine cette homélie en empruntant les mots de notre cher pape François. Ils résument bien ce que produit une vie bien ancrée sur les vertus fondamentales des chrétiens :
Quand nous rêvons de grandes choses, de belles choses, nous nous approchons du rêve de Dieu, des choses dont Dieu rêve à notre sujet.
Voilà ce qui réveille le monde, mission qu’il a spécifiquement confiée à tous les religieux en 2015. Entrons donc dans la confiance et travaillons dans la beauté de la maison commune! Changer notre monde, c’est une attitude de cœur et de foi qui accapare chaque instant de la vie!
Père Querbes, votre bénédiction prononcée le 29 août 1859 nous touche le cœur et nous motive toujours à ce qu’aimé et adoré soit Jésus!
Alain Ambeault, CSV
Source :
Bulletin d’information – Septembre 2019 – No 222 (PDF).