Porte la Parole !

Homélie de la Saint-Viateur

Chers frères et sœurs,

Les textes choisis ne peuvent pas être plus profonds et plus parlants pour notre communauté viatorienne aujourd’hui.

Nestor Fils-Aimé, csv

À juste titre, le frère St-Jacques me disait dernièrement émerveillé, combien il n’en revenait pas de l’actualité de ces textes écrits pourtant il y a près de deux mille ans.

La Deuxième Épître à Timothée daterait approximativement de l’an 67 ap. J.-C. Paul, en prison, sentant le moment de son exécution s’approcher, manifeste sa préoccupation pour l’avenir des églises et des disciples qu’il a formés.

Il encourage les croyants à ne pas baisser les bras, à persévérer dans l’espérance et la confiance et à poursuivre l’annonce de l’Évangile.

Au cœur des incertitudes et des hostilités, il invite Timothée à proclamer la Parole à temps et à contretemps.

Les Viateurs sont familiers avec ce texte. Notre confrère, feu Mgr Jacques Berthelet, devenu évêque, n’avait-il pas fait de cet appel sa devise épiscopale? Porte la Parole! »

Plus près de nous, à l’occasion du bicentenaire de la naissance de notre Fondateur, en 1993, ce thème n’avait-il pas ponctué le rassemblement des Viateurs du monde entier à Vourles?

Porte la Parole! Proclaim the Word! Lleva la Palabra!

Tels étaient les slogans que nous reprenions dans les principales langues usuelles de notre communauté.

Aujourd’hui, cette Parole a toute sa résonnance en nous et s’accorde bien à notre vécu actuel en terre canadienne au moment où nous soulignons 175 ans d’engagement à être des porteurs et porteuses de vie.

Oui ce temps est là où nous ne pouvons plus être triomphalistes et conquérants.

Ce temps est là où les bienfaits de notre être et de notre agir volent presqu’en éclats à cause de faux-pas lointains de quelques-uns qui ont laissé des traces.

Ce temps est là où l’annonce de Jésus et de son évangile ne figure pas parmi les emplois du temps les plus rémunérateurs et les métiers les plus prometteurs pour l’avenir.

D’autres voies s’offrent et qui semblent plus attirantes et moins honteuses. Nous entendons alors cette voix au fond de nous-mêmes nous dire comme à Timothée :

« Mais toi, Viateur d’aujourd’hui, en toute chose garde la mesure, supporte la souffrance, fais ton travail d’évangélisateur, accomplis jusqu’au bout ton ministère. »

Dans le texte de l’Évangile, Jésus se révèle comme le moissonneur dans les champs que son Père a semés et il nous invite à travailler à l’œuvre du Salut au-delà des limites et des contraintes. Cet appel est repris par le Pape François qui nous demande d’aller vers les périphéries.

Par sa Parole, le Christ fera jaillir une vie nouvelle
sur des champs nouveaux pour notre communauté.

Le passage de l’Évangile fait suite à la rencontre de Jésus avec la Samaritaine.

Ses disciples sont gênés car cette conversation de Jésus seul, avec une femme, une Samaritaine de surcroit, est venue briser tous les tabous et toutes les conventions sociales de l’époque. Le dessein du Christ dérange ses propres disciples qui doivent, eux aussi, accepter de vivre des déplacements, à la manière de ces réfugiés qui doivent laisser derrière eux tout ce qu’ils possèdent pour courir le risque de l’inconnu et de l’échec.

Jésus met l’accent sur sa mission : faire la volonté de Celui qui m’a envoyé et d’accomplir son œuvre. Voilà sa nourriture! Voilà ce qui le motive.

Qu’est-ce qui nous motive aujourd’hui, Viateurs en 2022? Quelle nourriture importe pour notre communauté à l’heure des grandes sécheresses et d’une apparente stérilité de la terre dans laquelle nous semons?

Cette fête de saint Viateur de 2022 nous lance dans une mission dont les bases ont été jetées il y a déjà longtemps.

« Les champs sont déjà dorés pour la moisson. »

Nous devons y aller avec et malgré notre vulnérabilité et nos fragilités. Nous devons y aller dans la confiance et avec le sentiment que le Seigneur nous donnera les moyens pour répondre à la mission.

Il y a 175 ans, une aventure s’amorçait avec trois inconnus venus de France; trois personnages aux caractères différents, qui ne détenaient pas de doctorat en missiologie, qui n’avaient pas une expérience vieille de longues années…Pourtant ce qu’ils ont semé a grandi, a fleuri, a produit, a perduré depuis 175 ans et perdure encore…

Que le Seigneur nous donne la lumière de l’Esprit pour nous révéler la meilleure manière pour que nous continuions à être au service de la Parole!

Qu’il nous donne les outils nécessaires pour que nous nous engagions dans la moisson avec la conviction que le champ a déjà été semé par Lui.

Puissions-nous prendre un autre départ, renforcés par la nourriture que nous puiserons ensemble dans la Parole de Dieu, dans notre vie communautaire d’accueil et d’ouverture ainsi que dans nos engagements au service des plus pauvres. Que Dieu soutienne toujours notre marche.

Amen!

Nestor Fils-Aimé, c.s.v.
Supérieur provincial

Source :
Bulletin d’information – Novembre 2022 – No 245 (PDF)

A lire également