Retraite paroissiale et conversions
Source :
Courrier Querbes – Automne 2014 – IX,3 (PDF).
Dans un de ses brouillons, le P. Querbes raconte sa participation à la mission qui a eu lieu dans une paroisse menée par quelques prêtres comme le voulait cette forme de retraite paroissiale prolongée au temps de la Restauration. On ignore ici la date et le lieu, mais voici son récit en survol de l’événement et du bouleversement auquel il a donné lieu.
Pas de répit !
« …il était huit heures du soir, on y était depuis midi; nous sommes forcés de cesser les cantiques et de nous retirer pour que le peuple quitte l’église. Nous nous rendons tous à moitié morts dans la maison où nous étions logés, en soupirant chacun pour son lit.
Mais hélas! en entrant, nous trouvons le corridor rempli d’hommes qui nous attendent; nos chambres en sont encombrées; chacun cherche son père et lui dit assez éloquemment, par ses larmes, à quel dessein il est venu et ce qu’il demande. Quel terrible moment! Quelle épreuve!
Enfin la grâce donne des forces; on fait un effort et on confesse trois heures. On ne peut plus suffire à tout, il faut monter en chaire, sans avoir eu un moment pour se préparer. Il ne faut plus songer à confesser des femmes; on n’en reçoit plus de nouvelles; elles pleurent, elles crient, elles se jettent à nos pieds, mais nous sommes inexorables : les hommes auront tous nos soins. »
La mission, au-delà de l’épreuve
« Nous redoublons tous d’ardeur pour tout ce qui peut concourir au succès de la mission; je m’anime plus qu’à l’ordinaire dans un discours; je suis tout en eau; je traverse un courant d’air et je suis saisi par le froid : me voilà au lit.
Le troisième jour, je suis plus fatigué, le médecin annonce une fluxion de poitrine. La communauté se met en prières; trois saintes religieuses font vœu, si je puis monter en chaire dans trois jours, de réciter tous les jours de leur vie, une prière à sainte Anne.
Le jour précis, j’ai le matin un grand accès de fièvre ; à quatre heures, j’éprouve une faim dévorante, n’ayant dans l’estomac depuis six jours que de la tisane et du sirop. Je me lève, je mange en quelques minutes à la dérobée un énorme morceau de pain; je vais à l’église, je monte en chaire, je chante, je prêche et je suis guéri. »
Conversion
Plus loin, le P. Querbes raconte la conversion d’un personnage dont l’impiété était notable :
« Un individu qui depuis longtemps rendait sa femme malheureuse par son irréligion et peut-être encore par le désordre de sa conduite, témoin de cette cérémonie (une procession portement de la croix), est frappé tout à coup par la grâce. Il sort précipitamment de la foule, se met à courir dans les rues; un de ses amis le rencontre; étonné de le voir ainsi courir, il lui en demande la cause; son ami, loin de s’arrêter, marche d’un pas plus rapide : il arrive à sa porte, sonne avec violence, court à l’appartement de sa vertueuse femme, se jette à ses pieds, fondant en pleurs, lui demande pardon : “Dieu vient de parler à mon cœur, je suis converti; je n’ai pu me résoudre à prononcer une parole avant de t’avoir donné cette agréable nouvelle; je vais me confesser. J’espère que Dieu me laissera vivre assez de temps pour expier les outrages que je lui ai faits et les chagrins que je t’ai causés. »